La société à 1 euro – ou presque : la S.à r.l.-S

La demande des jeunes créateurs de start-up mais celle aussi d’autres personnes voulant créer leur propre entreprise devenait ces dernières années de plus en plus pressante : la possibilité de créer une société à moindre coût, assurant ainsi à un plus large public un accès facilité à la forme sociétaire pour se lancer plus facilement dans un projet professionnel.

Les procédures actuelles de création d’entreprises au Luxembourg ont souvent été jugées trop lourdes, que ce soit en temps ou en capital à investir et peu compatibles avec l’esprit entrepreneurial. Cette situation n’était notamment pas favorable à l’établissement au Grand-Duché de jeunes entreprises créatives, particulièrement dans le milieu des nouvelles technologies, domaine dans lequel les gouvernements successifs ont entendu miser pour diversifier et dynamiser l’économie du pays.

Si nos voisins européens avaient déjà une longueur d’avance dans ce domaine – la France connaît l’« Entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) », l’Allemagne la « Mini-GmbH » et la Belgique la « SPRL-Starter », le Luxembourg entend résolument combler son retard en mettant sur le rail législatif le projet de loi ayant pour objet d’instituer la société à responsabilité limitée simplifiée[1], la « S.à r.l.-S ».

Les buts affichés du Gouvernement par la création de cette « variante » de la S.à r.l. classique, sont à la fois d’accroître la compétitivité de son arsenal juridique en matière de droits des sociétés et la stimulation de l’esprit d’entreprise en favorisant la création de société de prestations de services nécessitant peu de capitaux, engendrant ainsi également une création d’emplois et une contribution à l’innovation sur la scène entrepreneuriale luxembourgeoise.

Les principaux changements et nouveautés seront exposés ci-dessous. Il est encore important de noter que la S.à r.l.-S sera régie par les dispositions applicables aux sociétés à responsabilité limitée classiques à défaut de toute disposition spéciale dérogatoire.

  1. Les principaux avantages de la S.à r.l.-S par rapport à la S.à r.l. classique

1.1 Le capital social est réduit à un minimum de 1 €. Exit donc l’obligation pour les jeunes entrepreneurs de libérer encore avant le début de leur activité le montant de 12.394,86 € à titre de capital social de la société à créer.

Le projet de loi prévoit également que le capital devra être compris entre 1 € et 12.394,68 €, et devra être entièrement libéré au moment de la création de la société.

1.2 La constitution de la S.à r.l.-S pourra se faire dorénavant par acte sous seing privé, donc sans l’intervention d’un notaire.

Il est cependant conseillé de s’adresser à un professionnel pour la rédaction des statuts si les associés entendent se départir des statuts classiques d’une S.à r.l.-S et avoir des statuts adaptés à leur cas spécifique.

  1. Les principales limites et contraintes de la S.à r.l.-S

2.1 Seules les personnes physiques, à l’exclusion de toute personne morale, pourront être associés d’une S.à r.l.-S. . Cette restriction s’explique par le but affiché du Gouvernement, qui est « de stimuler la création d’entreprise auprès des entrepreneurs débutants » selon le commentaire des articles du projet de loi.

2.2 En contrepartie de cette possibilité d’avoir un capital social de départ très faible, le projet de loi prévoit une obligation de prélever annuellement un vingtième du bénéfice net de la société, à affecter à une réserve jusqu’à un plafond de 12.394,68 €.

2.3 Une autre limitation importante est constituée par le fait qu’une personne ne pourra être l’associée d’une seule S.à r.l.-S à la fois.

Le projet de loi prévoit également une « sanction » dans le cas d’une personne qui cumulerait la qualité d’associé dans plusieurs S.à r.l.-S : Cette personne sera, dans les limites légales proposées par l’auteur du projet de loi, personnellement caution solidaire et indivisible de tout engagement futur de la deuxième S.à r.l.-S dans laquelle elle est devenue associée. Ceci revient en pratique à ôter, pour les opérations en cause, toute utilité à la forme sociétaire et au modèle de responsabilité limitée y attaché.

2.4 Le projet de loi limite en outre l’objet social d’une S.à r.l.-S aux seules activités pour lesquelles une autorisation de commerce est nécessaire.

2.5 Finalement les gérants d’une S.à r.l.-S doivent être des personnes physiques, à l’exclusion de toute personne morale.

  1. Le coût effectif minimal

La constitution d’une S.à r.l.-S ne se fera bien évidemment pas au coût d’un euro.

Le coût effectif à prévoir pour la constitution d’une S.à r.l.-S reste cependant modique, et s’élève au minimum à 191,00 € se composant comme suit :

Capital social minimum à libérer 1,00 €
Droits d’enregistrement 75,00 €
Immatriculation RCSL 15,00 €
Publication Mémorial 100,00 €
TOTAL 191,00 €

Cette somme, même non limitée finalement à l’euro symbolique, ne devrait toutefois pas constituer un frein à la création d’entreprises nouvelles et de start-up au Luxembourg, de sorte que la S.à r.l.-S devrait pouvoir remplir l’objectif qui lui est assigné : faciliter le lancement d’une activité nécessitant peu de fonds.

Il ne reste plus qu’à souhaiter au projet de loi qu’il franchisse les différentes étapes de la procédure législative sans encombre pour que la S.à.r.l.-S entre en vigueur dans les meilleurs délais.


[1] Projet de loi n° 6777 ayant pour objet d’instituer la société à responsabilité limitée simplifiée et portant modification de 1° la loi modifiée du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales ; et 2° la loi modifiée du 19 décembre 2002 concernant le registre de commerce et des sociétés ainsi que la comptabilité et les comptes annuels des entreprises


Auteur: Pierre Goerens, Partner chez Etude d’Avocats JEITZ & GOERENS

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7 comments
  1. Bonjour Vincent,

    Je ne peux pas de donner de réponse précise, mais si le projet ne devait pas rencontrer trop d’oppositions nous pouvons espérer que la loi entre en vigueur encore avant l’été 2015, dans le meilleur des cas.

    Pierre

  2. Bonjour,
    est-ce que vous croyez que la SARL S pourra être utilisée pour une activité de “consultant”?

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